Le temps de la séparation

Cette semaine, j'ai retrouvé le chemin du travail. J'ai retrouvé mon train du matin et du soir, mes stations de métro. J'ai retrouvé ma bibliothèque, mes collègues, les lecteurs et les livres, le bip de la douchette qui scanne les codes-barres, les gestes répétitifs et les projets en cours, les discussions dans la cuisine. J'ai retrouvé mes marques à une vitesse que je n'imaginais pas, comme si je n'avais fait que partir en vacances, comme si rien n'avait vraiment changé en cinq mois. Comme si j'avais remonté le temps, aussi.

Rien n'a vraiment changé sauf ce manque, ce grand vide. Il n'y a plus de bébé dans mon ventre. Il n'y a pas de bébé dans mes bras. L'hippocampe est si loin que ça pourrait être comme s'il n'existait pas. Moi qui m'épanouissais dans mon travail, je découvre la longueur des journées sans se voir. Douze heures, trois fois par semaine : une éternité. Et onze et dix heures pour les heureux jours plus courts. C'est long, une semaine de travail, quand le cœur reste en apnée et ne retrouve son souffle que de trop brefs instants - et encore, car il faut courir sans cesse : tant de choses à faire, si peu de temps. On oublie le ludique pour l'efficace...
Il nous reste la nuit. L'hippocampe se réveille très souvent, par faim peut-être, lui qui découvre chez sa nounou les biberons de lait artificiel, par besoin de contact sans doute surtout. Parfois je me rendors avec lui sur moi, rattrapée par la fatigue. Ce n'est pas grave.
On a décidé de se laisser le temps, on a décidé de prendre un jour après l'autre. On va s'y faire, pas vrai, à ces soirées trop courtes, à ces courses contre la montre, à ces séparations sans cesse répétées. On va s'y faire, et je retrouverai mon plaisir de travailler. On va s'y faire, et j'apprendrai à l'aimer mieux et plus fort d'être obligée de le quitter si souvent.

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